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Pour une nouvelle vision de l'innovation; Pascal Morand et Delphine Manceau

Les réflexions des pouvoirs publics quant aux performances françaises en matière d'innovation et, ses leviers de stimulation, ont conduit Pascal Morand etDelphine Manceau a rédiger en 2009 le rapport intitulé "Pour une nouvelle vision de l'innovation".

Le rapport débute par l'analyse de la perception de l'innovation, et révèle qu'innovations technologiques et innovations non-technologiques sont des visions encore opposées du point de vu des entreprises. La France, déplorent les auteurs, s'inscrit davantage dans l'invention que l'innovation.
En effet, tels que le soulignent Tim Brown dans son ouvrage "L'esprit Design" mais également les auteurs de la "Stratégie Océan Bleu", on ne peut soustraire la valeur d'USAGE à l'innovation, sans quoi il en résulte un échec commercial.
Cette nécessité de voir au delà de l'innovation technologique s'appuie sur une vision HOLISTIQUE de l'innovation.

"L'innovation, facteur-clé de la compétitivité des entreprises européennes"
L'innovation, principal vecteur de compétitivité, est un élément essentiel de différenciation de l'offre, permettant d'enrayer la concurrence par le prix.
La créativité est nécessaire afin de transformer la R&D en outil compétitif.
"L'innovation réussie apparaît (...) comme un moyen de sortir de cette logique centrée sur les coûts pour stimuler la consommation des particuliers et renouveler les équipements des entreprise".
De plus, les périodes de crises économiques devraient être propices à s'intéresser à l'innovation, car celle-ci contribue à relancer le croissance.
La France, poursuivent les auteurs, se situe dans le groupe des pays les moins performants de l'U.E.

Aujourd'hui, on constate que l'innovation est concentrée en France dans la R&D et les dépôts de brevets, alors que la notion d'innovation nécessite d'aller plus loin. Il est pourtant essentiel de distinguer innovation et invention, l'innovation ayant vocation a être adoptée par le consommateur et donc à s'inscrit dans un marché.
Pour ce faire, il convient de décloisonner les silos, de construire une réflexion transversale, et de faire évoluer les mentalités, "l'innovation étant une culture avant d'être une méthode".
Le directeur de l'innovation d'Hermès insiste sur le fait que "l'innovation est un état d'esprit et une démarche. Il s'agit d'éveiller la curiosité et d'envisager des voies inattendues (...)".
Cela implique d'accepter la prise de risque et l'échec, indispensables afin d'encourager les différentes idées et la liberté d'entreprendre.
Et le directeur scientifique de Total d'ajouter que "la technologie est un capital, la R&D est un service, tandis que l'innovation est une culture".

Les auteurs proposent plusieurs versions d'innovation:
-l'innovation d'offre, qui a vocation à être commercialisée
-l'innovation de processus, qui renforce la productivité, la qualité, la fiabilité
-l'innovation de modèle économique qui consiste à redéfinir les sources de revenus de l'entreprise
-l'innovation d'usage qui change la façon d'utiliser un produit (ex: les compotes à boire)
-l'innovation technologique
-l'innovation technologique + d'usage

Pascal Morand et Delphine Manceau aborde le chapitre 2 avec la notion d'INNOVATION INCREMENTALE (j'aurai tendance à penser qu'il s'agit là d'une oxymore).
Les auteurs poursuivent: "On distingue généralement l'innovation incrémentale, qui s'inscrit dans la continuité de l'existant, des innovations de rupture qui révolutionnent un secteur ou un usage."
En bref, une INNOVATION DE RUPTURE entraîne une série "d'innovations en cascade".
Quelques exemples sont cités, tels que internet (qui a effectivement affecté tout les secteurs et a été à la source de multiples innovations).

Les auteurs admettent que les innovations de ruptures sont extrêmement rares, et que, toute innovation nécessite l'expérimentation et la multiplication de projets pour espérer aboutir à quelques innovations réussies.
"Le secret des entreprises qui innovent le plus, c'est qu'elles développent plus de projets et échouent aussi davantage que les autres".
L'ouvrage rappellent, à l'instar du Design Thinking, qu'il est impératif de ne pas sélectionner précocement les projets à développer.
Et d'ajouter que "le rôle du management n'est pas d'empêcher le risque mais de construire la capacité à se reconstruire quand les échecs surviennent".
De ce point de vu, le stigmatisation de l'échec en France, est un véritable frein à l'audace nécessaire aux projets innovants. L'état a donc un rôle à jouer en tant que "moteur psychologique essentiel".

Les auteurs suggèrent qu'un label valorisant les entreprises innovantes soit mis en place, afin d'encourager l'économie dans cette voie.
La politique d'achat public pourrait également privilégier les entreprises et produits innovants.
Enfin, toujours dans une réflexion visant à aider la France à s'imposer économiquement, les auteurs rappellent que la mention "made in France" est actuellement très encadrée et que cela réduit les possibilités d'assoir son image au niveau mondial.
Comme dans le rapport sur la mondialisation, ils proposent qu'un label "designed in France" soit mis en place, afin d'assoir la part d'immatériel propre à l'économie française.


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