Accéder au contenu principal

Les marques enseignes françaises: la fin d'un business model?


En décembre 2016, lors de la journée “Perspectives internationales mode et textile 2017”, Pierre-François Le Louët tire la sonnette d’alarme “L'audace manque globalement aux grand acteurs de l’habillement français qui inéluctablement vieillissent.
Et pour cause, “le secteur de l’habillement est en perte de vitesse depuis un certain temps déjà. Entre déficit de repères, stratégies désordonnées et concurrence acérée ou hors contexte, les marques, faute de sens et de personnalité affirmée, ne séduisent plus et ne font plus recette” déplorait Florence Berthier en novembre 2017, dans le magazine Influencia.

La régression du niveau de consommation de l’habillement n’est pourtant pas inéluctable, alors que les enseignes françaises persistent à accuser la météo de tous leurs maux, les enseignes étrangères telles que Primark et Zara poursuivent leur progression.
Les enseignes qui ont le plus de mal aujourd’hui sont celles qui sont restées dans le ventre mou du marché, sans avoir pris de positions stratégiques fortes explique Yves Martin, expert consommation chez Wavestone, en janvier 2017.

Un changement de paradigme accentué par la révolution numérique.

“On constate un changement de paradigme dans l’industrie textile où les règles ne sont plus dictées par les marques mais par le consommateur lui-même. (...) C’est la fin du modèle discounter classique: proposer les prix les plus bas ne suffit plus, il faut maintenant être capable d’offrir des produits de qualité et un contenu de marque différent explique Marie Dupin, Directrice axe mode chez Nelly Rodi.

La relation marque/consommateur a mué vers un dialogue réciproque, voire, vers un empowerment du consommateur, mettant un terme au message à sens unique: “Aujourd’hui, la prolifération des forums et des communautés de marque permet aux consommateurs de concevoir leur propre fable et de s’approprier celle-ci. On parle ainsi de Consumer Empowerment car les clients deviennent aussi, de fait, les contributeurs d’une offre qui échappe en partie à la source dont elle émane.” 

L’avènement de l’immédiateté.

“La mutation du rapport au temps qui s’est produite depuis une quinzaine d’années constitue une des caractéristiques les plus marquantes du fonctionnement de la société contemporaine.” 

L’avènement de l’immédiateté invite les enseignes tant à accélérer le rythme des collections, afin de s’inscrire dans un renouveau permanent, qu’à revoir leur délais d’engagement de production. La posture du consommateur s’inscrit dans l’impatience, que ce soit dans son parcours d’achat, dans sa prise de décision, que dans sa relation à la marque, qui doit désormais lui être dévouée et disponible 24h sur 24. Cette injonction à l’optimisation du parcours client accentue la compétition entre marques, qui désormais doivent se battre également sur le terrain du service, de la “customer experience” optimale et omnicanale.
“L'immédiateté: Le temps infinitésimal régit désormais la relation avec le consommateur. (...) Le retail est passé d’un parcours client relativement long à un parcours client hyper court explique Jean-Marc Liduena (Deloitte).

Liquid expectations.

Le consommateur reporte ses attentes d’une industrie à une autre, sans distinction.
En effet, les GAFA influent sur l’ensemble de la société de consommation, imposant leur niveau de services telle une norme mondialisée: “L’expérience d’un client vécue avec n’importe quel produit viendrait ainsi modifier sa manière d’appréhender un produit d’une toute autre catégorie. Le challenge majeur pour une entreprise est donc d’élargir le scope d’observation de la concurrence - et donc des usages clients - à n’importe quel autre secteur, pourvu qu’il soit porteur d’une nouvelle technologie ou d’un modèle différenciant de consommation” explique Julien Cocquerel, Account Director chez Kassius.

Dans un environnement mouvant et face au changement de paradigmes, comment faire avancer les marques-enseignes françaises à la vitesse du 21ème siècle?

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Ce que marque veut dire... de Marie-Claude Sicard

Marie-Claude Sicard , dans son ouvrage intitulé "Ce que marque veut dire..." aborde l'identité de marque comme un ensemble systémique . L'identité de marque, note-elle reprenant une citation de Pierre Tap dans son ouvrage "L'identité" , repose sur "la dialectique du semblable et du différent". De fait, il n'y a d'identité que dans la différence. L'auteure rappelle par ailleurs que l'identité visuelle n'est qu'une des composantes de l'identité de marque, au même titre que le prix, les produits, al publicité, le système de vente et l'ensemble des individus qui l'incarne. Elle interroge le modèle du marketing-mix, dont un quart représenterait la communication alors que, selon elle, tout communique: le produit, le prix, la distribution. "Tout ce que fait une marque est un acte de communication: la conception d'un produit, sa politique de prix et de distribution, la fiabilité de ses services, sa

Le bonheur paradoxal. Essai sur la société d'hyperconsommation de Gilles Lipovetsky

"La révolution de la consommation a été elle-même révolutionnée." C'est ainsi que Gilles Lipovetsky introduit sont ouvrage intitulé "Le bonheur paradoxal", un essai partant du constat qu'une nouvelle phase du capitalisme de consommation a émergé: la société d'hyperconsommation . A travers cet ouvrage, Gilles Lipovetsky nous offre les clés afin d'appréhender l'évolution de notre rapport à la consommation, abreuvées de considérations économiques, sociologiques et philosophiques. Qu'est ce que la société d'hyperconsommation? "La société d'hyperconsommation coïncide avec un état de l'économie marqué par la centralité du consommateur" nous indique l'auteur. Plusieurs phases sont énumérées dans l'histoire de la société de consommation: 1880/1945 illustre la période de mise en place du capitalisme de consommation et de développement de la production de masse (taylorisme/fordisme). Cette période voit naître

Le marketing expérientiel, Vers un marketing de la cocréation; de Claire Roederer et Marc Filser

Claire Roederer et Marc Filser nous proposent une petite histoire du marketing expérientiel étoffé d'exemples concrets pour cette deuxième édition de leur ouvrage intitulé "Le marketing expérentiel; Vers un marketing de la cocréation". Quelques bases pour débuter, avec le rappel des origines du marketing dit "traditionnel", comme un modèle issu de l'économie centrée sur la valeur intrinsèque des ressources d'échange, dans une logique de GOOD-DOMINANT, alors que l'économie contemporaine est dominée par les services, eux-mêmes renforcés par la révolution numérique. Dès lors, la logique de SERVICE-DOMINANT est enclin à esquiver le GOOD-DOMINANT, avec pour principes la culture de l'organisation en tant que SOURCE DE CONTROLE et D'INSPIRATION, les pratiques organisationnelles CROSS-FONCTIONNELLES, le souci de produire des SOLUTIONS CLIENTS, mais aussi de gérer la COPRODUCTION avec le consommateur et la COCREATION GLOBALE DE VALEUR. Le market